Transaction après une rupture conventionnelle.
Employeur et salarié peuvent conclure une transaction après avoir signé une rupture conventionnelle individuelle. Pour autant, la Cour de cassation rappelle que la transaction est nulle si elle porte sur un élément inhérent et essentiel de la rupture du contrat de travail. Il s’agissait ici de l’indemnité
de rupture conventionnelle que l’employeur doit verser au salarié et qui constitue, sans doute possible, un élément essentiel à la validité de la rupture conventionnelle.
Un salarié conteste la validité de la rupture conventionnelle et de la transaction qui a suivi
Un employeur et un salarié ont signé une rupture conventionnelle le 16 août 2013, homologuée par l’administration le 19 septembre 2013. Il ressort des faits que le salarié souhaitait quitter l’entreprise pour effectuer une formation de soins infirmiers tout en bénéficiant de ses droits au chômage. L’employeur avait accepté la demande du salarié à condition qu’il renonce à percevoir son indemnité de rupture conventionnelle qui figurait dans la convention de rupture homologuée par l’administration.
Le 25 septembre 2013, le salarié avait renoncé à percevoir son indemnité de rupture conventionnelle d’un montant de 15 526 €. Par la suite, il avait ensuite invoqué, de ce fait, un préjudice et réclamé une indemnisation.
Le 30 septembre 2013, l’employeur et le salarié avaient alors conclu une transaction indiquant qu’en contrepartie de la prise en charge par l'employeur du coût de la formation équivalant à 5 302 €, le salarié renonçait définitivement et totalement à exercer à l'encontre de l’employeur une action judiciaire quelconque qui serait basée sur les relations contractuelles de travail ou sur la rupture de ces relations.
Mais dans les mois qui ont suivi, le salarié a contesté en justice la validité de la rupture et de la transaction. Il a obtenu gain de cause.
Si un salarié réclame une rupture conventionnelle à son employeur en soutenant qu’il est prêt à renoncer à l’indemnité de rupture conventionnelle qui lui est en principe due, l’employeur qui accepte, est dans l’illégalité. Quelles que soient les circonstances, le salarié doit percevoir une indemnité d’un montant minimum. Si négociation il y a, ce serait uniquement pour éventuellement verser une indemnité d’un montant supérieur, mais en aucun cas d’un montant inférieur, voire aucune indemnité. La rupture conventionnelle ne serait alors pas valable (c. trav. art. L. 1237-13).
Une transaction peut être conclue après une rupture conventionnelle
La Cour de cassation a admis, dans une décision du 26 mars 2014, qu’un salarié et un employeur peuvent conclure une rupture conventionnelle individuelle et ensuite une transaction, à deux conditions (cass. soc. 26 mars 2014, n° 12-21136, BC V n° 91) :
-d’une part, la transaction doit être postérieure à l’homologation de la rupture conventionnelle (ou à la notification de l’autorisation de rupture s’il s’agit d’un salarié protégé) ;
-d’autre part, la transaction ne doit pas avoir pour objet de régler un différend relatif à la rupture du contrat de travail, mais un différend relatif à son exécution, sur des éléments non compris dans la convention de rupture.
Elle rappelle cette double condition dans son arrêt du 16 juin 2021.
La transaction est nulle si elle règle un différend relatif à la rupture du contrat de travail
Dans cette affaire, la transaction avait bien été conclue postérieurement à l’homologation de la rupture conventionnelle ; la transaction étant datée du 30 septembre 2013 et l’homologation du 19 septembre 2013.
Néanmoins, les juges ont relevé que la seconde condition permettant de conclure une transaction après une rupture conventionnelle n’était pas remplie étant donné que la transaction portait sur un élément inhérent et essentiel de la rupture du contrat de travail - à savoir l'indemnité de rupture conventionnelle, et non sur les conditions d'exécution de la relation de travail.
Le salarié, postérieurement à l'homologation de la convention de rupture, avait effectivement renoncé à percevoir l'indemnité de rupture, puis avait invoqué un préjudice résultant de cette renonciation et réclamé une indemnisation. Il avait ensuite accepté, aux termes du protocole transactionnel, en contrepartie de la prise en charge par l'employeur du coût de sa formation, de renoncer à exercer à l'encontre de celui-ci une action judiciaire basée sur les relations contractuelles de travail ou sur la rupture de ces relations.
Les juges ont donc prononcé la nullité de la transaction, ce qu’a approuvé la Cour de cassation.
Par voie de conséquence, le salarié a été sommé de restituer le chèque de 5 302 € versé par son employeur pour financer sa formation. De son côté, l’employeur a été condamné à verser au salarié 1000 € de dommages et intérêts pour attitude déloyale à l’égard de ce dernier compte tenu de l’importante différence entre la somme effectivement versée au salarié et celle de 15 526 € qu’il aurait dû percevoir en guise d’indemnité de rupture conventionnelle.
La rupture conventionnelle a aussi été annulée et à ce titre, l’employeur a été condamné à payer au salarié 15 982,25 € d'indemnité de licenciement, 5 553 € d'indemnité de préavis et 555 € euros de congés payés afférents, auxquels s’ajoutent 20 000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Cass. soc. 16 juin 2021, n° 19-26083 D