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Représentants du personnel

Salaire des représentants du personnel

Articuler heures de délégation et rémunération

Pour calculer les salaires dus au titre des heures de délégation, l'employeur doit identifier les différents éléments de rémunération à prendre en compte. Mais il faut aussi veiller, le cas échéant, à ce que la prise d'heures de délégation n'ait aucun impact sur le salaire variable.

Calculer la rémunération des heures de délégation

Pas de perte de salaire. - Les heures de délégation sont considérées comme du temps de travail (c. trav. art. L. 2142-1-3, L. 2143-17, L. 2232-23, L. 2315-3 et L. 2325-7). Le salarié qui utilise ces heures ne doit donc subir aucune perte de rémunération. L'employeur fait comme si le représentant du personnel avait travaillé normalement et, sauf cas particuliers, lui verse son salaire de base habituel à l'échéance de la paie.

 

 

À noter : Les heures de délégation ne sont pas mentionnées sur le bulletin de paie, mais sur un document annexe (c. trav. art. R. 3243-4).

 

Prise en compte des primes « de sujétion ». - Certaines primes visent à compenser une contrainte particulière occasionnée par le travail (prime de nuit, de déplacement, de douche, d'insalubrité, d'outillage, etc.). Lorsqu'elles sont versées de façon systématique et ont toujours le même montant, elles font partie intégrante du salaire.

En vertu du principe selon lequel la prise d'heures de délégation n'entraîne pas de baisse de la rémunération, l'employeur doit prendre en compte  ces primes forfaitaires dans le calcul de la rémunération correspondant aux heures de délégation (cass. crim. 4 mai 1979, n° 78-91710, B. crim. n° 162 ; cass. soc. 2 juin 1992, n° 88-45662, BC V n° 365 ; cass. soc. 15 décembre 1993, n° 92-42539 D).

 

 

À noter : La prime n'est pas prise en compte si elle correspond à un remboursement de frais (voir ci-après).

 

Prise en compte des majorations de salaire. - Les majorations de salaire octroyées en compensation de certaines contraintes obéissent à la même logique que les primes de sujétion. Ainsi, lorsqu'un représentant du personnel bénéficie d'une majoration de salaire parce qu'il travaille le week-end, l'employeur doit appliquer cette majoration à la rémunération des heures de délégation, même si ces heures ont été prises en semaine (cass. soc. 28 octobre 2008, n° 07-40524 D).

Prise en compte des commissions. - Pour les salariés payés à la commission, l'employeur doit raisonner sur la base du salaire réel et non en fonction d'une évaluation forfaitaire (cass. soc. 29 mai 2001, n° 98-45758, BC V n° 187). Il lui faut donc reconstituer les sommes que les salariés auraient perçues s'ils avaient travaillé.

Concrètement, les tribunaux ont admis le calcul d'un « salaire de référence » à partir de la moyenne des commissions perçues au cours des 12 derniers mois. L'employeur peut déduire de ce salaire la rémunération des heures de délégation accomplies durant cette période (cass. soc. 7 novembre 2007, n° 06-42302 D).

Remboursement de frais écartés. - Les remboursements de frais professionnels ne sont pas dus dès lors que, en raison de la prise d'heures de délégation, le salarié n'engage aucun frais.

 

 

Exemple : Un salarié percevait en temps normal une indemnité de repas, car il travaillait en équipe et devait déjeuner en dehors des heures habituelles de repas du personnel. Or, lorsqu'il était en délégation, il pouvait déjeuner en même temps que les autres salariés. L'employeur n'avait donc pas à inclure l'indemnité de repas dans les sommes dues au titre des heures de délégation. Il lui devait en revanche un titre-restaurant, comme aux autres salariés travaillant selon l'horaire normal (cass. soc. 9 juin 1988, n° 85-43379, BC V n° 354).

Encore faut-il que l'indemnité corresponde réellement à un remboursement de frais. Si ce n'est pas le cas, elle correspond en réalité à une indemnité forfaite de sujétion (voir ci-avant).

À titre d'exemple, une compagnie aérienne versait des indemnités à titre de remboursement des frais exposés par le personnel navigant. Cependant, en pratique, elle les accordait aussi au personnel au sol. Dès lors, ces indemnités contituaient un élément de rémunération et l'employeur devait donc les attribuer pour les heures de délégation accomplies au sol par des personnels du personnel « navigant » (cass. soc. 3 mars 2010, n° 08-44859, BC V n° 52).

Heures prises en dehors de l'horaire normal

Temps complet : heures supplémentaires. - En principe, le représentant du personnel prend ses heures de délégation sur son temps de travail. Cependant, les nécessités de son mandat peuvent l'amener à utiliser des heures de délégation en dehors de son horaire habituel.

 

 

Exemple : Pour un salarié qui travaille la nuit, les nécessités de son mandat justifient qu'il prenne des heures de délégation le jour (cass. soc. 5 janvier 1995, n° 90-45187 D).

 

Dès lors qu'il travaille à temps complet, un salarié qui prend des heures de délégation en dehors de son horaire normal travaille a priori au-delà de la durée légale du travail. Les heures de délégation constituent par conséquent des heures supplémentaires, que l'employeur doit payer avec les majorations correspondantes (cass. soc. 12 février 1991, n° 88-42353, BC V n° 67).

Temps partiel : heures complémentaires. - Les salariés à temps partiel ne peuvent pas consacrer plus du tiers de leur temps de travail à leur mandat (c. trav. art. L. 3123-29). Si, en raison des nécessités de son mandat, le représentant du personnel à temps partiel utilise les heures de délégation au-delà de ce quota, il les prend nécessairement en dehors de son temps de travail. Il s'agit alors d'heures complémentaires, payées au taux normal ou, dans certaines conditions, majorées (c. trav. art. L. 3123-19).

 

Pas d'impact sur le salaire variable

Certains éléments de salaire varient en fonction des performances du salarié (commissions, primes d'objectifs, etc.). L'employeur doit faire en sorte que la prise d'heures de délégation, qui diminue nécessairement le temps de travail effectif, n'ait pas d'incidence sur le variable.

En pratique, il lui faut donc (cass. soc. 6 juillet 2010, n° 09-41354 FSPBR) :
- adapter les objectifs du salarié, qui doivent être réduits à hauteur du temps que l'intéressé pourra effectivement consacrer à son travail ;
- ne pas tenir compte du fait que les objectifs ont été réduits lorsqu'il calcule l'abattement éventuellement pratiqué sur le variable.

Ainsi, un salarié qui consacrerait le tiers de son temps de travail à son mandat verrait ses objectifs réduits d'un tiers. S'il atteint ses objectifs, il percevra l'intégralité de la prime. S'il n'en réalise que la moitié, l'employeur appliquera à la rémunération variable l'abattement prévu dans un tel cas. Il ne doit pas augmenter cet abattement au prétexte que le salarié a « seulement » réalisé la moitié d'un objectif déjà réduit du tiers. ✖

 

Défaut de paiement

Hormis en cas de dépassement du crédit d'heures, l'employeur doit verser la rémunération correspondant aux heures de délégation à l'échéance normale de la paie. À défaut, le salarié pourra saisir le juge qui tranchera l'affaire en urgence et ordonnera le versement immédiat d'une provision (cass. soc. 10 janvier 2006, n° 04-46838 D). L'employeur s'expose en outre à des poursuites pour délit d'entrave (cass. crim. 22 novembre 1988, n° 87-84669 D).