Libertés individuelles

L'employeur, la HALDE et la religion des salariés

La HALDE fait le point sur les règles à connaître par l'employeur soucieux de gérer le fait religieux dans l'entreprise sans enfreindre la liberté de religion des salariés.

Expression religieuse dans l'entreprise

Liberté d'expression sur la religion : limites

Expression des convictions religieuses. - Si un salarié peut exprimer dans l'entreprise ses convictions religieuses, c'est dans les limites de sa liberté d'expression (délib. HALDE 2009-117 du 6 avril 2009, points 1, 2 et 27). En effet, si le salarié jouit de cette liberté, il ne doit pas en abuser en tenant des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs (voir Dictionnaire Social, « Liberté d'expression »).

Interdiction du prosélytisme. Même si un salarié peut librement s'exprimer dans l'entreprise sur sa religion, il ne doit pas abuser de cette liberté en adoptant une attitude de prosélyte (délib. HALDE 2009-117, points 28 à 34). En d'autres termes, il ne peut, par exemple, ni tenter d'imposer ses convictions, ni chercher à convertir. Il a été admis qu'un employeur puisse sanctionner un salarié qui adopte une attitude prosélyte vis-à-vis des autres salariés ou encore des clients en raison de la perturbation que cette attitude entraîne sur le bon fonctionnement de l'entreprise ou encore pour non-respect de l'obligation de loyauté ou de neutralité attachée à certaines fonctions (ex. : pour un formateur vis-à-vis des stagiaires).

 Le licenciement pour faute grave d'un animateur de centre de loisirs laïc était justifié parce qu'il n'avait pas respecté son obligation de neutralité en lisant la Bible et en distribuant des prospectus en faveur de sa religion aux enfants (cons. prud'h. Toulouse, 9 juin 1997). De même, le licenciement pour faute grave d'un salarié dont le prosélytisme se traduisait notamment par la désorganisation de son service avait une cause réelle et sérieuse (CA Basse-Terre, 6 novembre 2006, n° 06 / 00095).

En tout état de cause, l'employeur est invité à rester prudent : ce n'est pas l'expression d'une croyance religieuse en elle-même qui est en question mais les conséquences de l'attitude du salarié. Il doit veiller à ce que ses décisions ne s'apparentent pas à des discriminations en raison des convictions religieuses. Il prendrait le risque de voir ses décisions annulées et d'être condamné au pénal (c. trav. art. L. 1132-1).

Religion au travail et tenue vestimentaire

Port d'un signe religieux. - Le port d'un vêtement ou d'un insigne susceptible d'exprimer une adhésion publique à une religion relève de la liberté de religion. Il ne constitue pas en soi un acte de prosélytisme (délib. HALDE 2009-117, points 2 et 36). Restrictions liées à la sécurité. L'employeur peut légitimement restreindre le droit du salarié de manifester sa religion dans l'entreprise pour des impératifs de sécurité au travail. Par exemple, l'employeur peut, dans certains cas, imposer le port d'un équipement de protection, comme une tenue stérile (voir RF Social, Revue d'actualité 82, pp. 21 à 25), qui s'avère incompatible avec celui d'un signe religieux (délib. HALDE 2009-117, point 40).

Restrictions liées au contact avec la clientèle. - Il s'agit ici pour l'employeur de concilier la liberté de religion des salariés et l'intérêt de l'entreprise (délib. HALDE 2009-117, points 43 à 51). Si l'employeur souhaite interdire à des salariés de porter tel vêtement ou insigne religieux, il ne peut pas arguer du seul contact avec la clientèle. Il doit s'appuyer sur d'autres éléments objectifs, étrangers à toute discrimination, pour justifier sa décision au regard des tâches des salariés et du contexte de leur exécution (CA Paris 19 juin 2003, 18e ch., RG 03/30

 

RF Social de juillet 2009

Date de parution: 07/2009

Libertés individuelles

L'employeur, la HALDE et la religion des salariés

La HALDE fait le point sur les règles à connaître par l'employeur soucieux de gérer le fait religieux dans l'entreprise sans enfreindre la liberté de religion des salariés.

Expression religieuse dans l'entreprise

Liberté d'expression sur la religion : limites

Expression des convictions religieuses. - Si un salarié peut exprimer dans l'entreprise ses convictions religieuses, c'est dans les limites de sa liberté d'expression (délib. HALDE 2009-117 du 6 avril 2009, points 1, 2 et 27). En effet, si le salarié jouit de cette liberté, il ne doit pas en abuser en tenant des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs (voir Dictionnaire Social, « Liberté d'expression »).

Interdiction du prosélytisme. Même si un salarié peut librement s'exprimer dans l'entreprise sur sa religion, il ne doit pas abuser de cette liberté en adoptant une attitude de prosélyte (délib. HALDE 2009-117, points 28 à 34). En d'autres termes, il ne peut, par exemple, ni tenter d'imposer ses convictions, ni chercher à convertir. Il a été admis qu'un employeur puisse sanctionner un salarié qui adopte une attitude prosélyte vis-à-vis des autres salariés ou encore des clients en raison de la perturbation que cette attitude entraîne sur le bon fonctionnement de l'entreprise ou encore pour non-respect de l'obligation de loyauté ou de neutralité attachée à certaines fonctions (ex. : pour un formateur vis-à-vis des stagiaires).

 Le licenciement pour faute grave d'un animateur de centre de loisirs laïc était justifié parce qu'il n'avait pas respecté son obligation de neutralité en lisant la Bible et en distribuant des prospectus en faveur de sa religion aux enfants (cons. prud'h. Toulouse, 9 juin 1997). De même, le licenciement pour faute grave d'un salarié dont le prosélytisme se traduisait notamment par la désorganisation de son service avait une cause réelle et sérieuse (CA Basse-Terre, 6 novembre 2006, n° 06 / 00095).

En tout état de cause, l'employeur est invité à rester prudent : ce n'est pas l'expression d'une croyance religieuse en elle-même qui est en question mais les conséquences de l'attitude du salarié. Il doit veiller à ce que ses décisions ne s'apparentent pas à des discriminations en raison des convictions religieuses. Il prendrait le risque de voir ses décisions annulées et d'être condamné au pénal (c. trav. art. L. 1132-1).

Religion au travail et tenue vestimentaire

Port d'un signe religieux. - Le port d'un vêtement ou d'un insigne susceptible d'exprimer une adhésion publique à une religion relève de la liberté de religion. Il ne constitue pas en soi un acte de prosélytisme (délib. HALDE 2009-117, points 2 et 36). Restrictions liées à la sécurité. L'employeur peut légitimement restreindre le droit du salarié de manifester sa religion dans l'entreprise pour des impératifs de sécurité au travail. Par exemple, l'employeur peut, dans certains cas, imposer le port d'un équipement de protection, comme une tenue stérile (voir RF Social, Revue d'actualité 82, pp. 21 à 25), qui s'avère incompatible avec celui d'un signe religieux (délib. HALDE 2009-117, point 40).

Restrictions liées au contact avec la clientèle. - Il s'agit ici pour l'employeur de concilier la liberté de religion des salariés et l'intérêt de l'entreprise (délib. HALDE 2009-117, points 43 à 51). Si l'employeur souhaite interdire à des salariés de porter tel vêtement ou insigne religieux, il ne peut pas arguer du seul contact avec la clientèle. Il doit s'appuyer sur d'autres éléments objectifs, étrangers à toute discrimination, pour justifier sa décision au regard des tâches des salariés et du contexte de leur exécution (CA Paris 19 juin 2003, 18e ch., RG 03/30212).

Une salariée travaillait à un poste de télémarketing en contact occasionnel avec des clients. Elle portait un voile qu'elle avait refusé de nouer « en bonnet ». L'employeur ne faisant état d'aucun problème relationnel de cette salariée avec un client en raison du port du foulard, il ne pouvait pas la licencier (CA Paris 19 juin 2003, 18e ch., RG 03/30212).

La religion dans le règlement intérieur

Pas d'interdiction générale. - Une interdiction générale et absolue du port de tout signe religieux dans le règlement intérieur serait disproportionnée (délib. HALDE 2008-32 du 18 février 2008). Un employeur ne peut pas non plus interdire toutes les discussions d'ordre religieux (CE 25 janvier 1989, n° 64296). En effet, l'employeur ne peut inscrire dans le règlement intérieur des restrictions aux libertés que si elles sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché (c. trav. art. L. 1321-3).

Conseils de rédaction. - La HALDE conseille aux employeurs, souhaitant inscrire dans leur règlement intérieur une disposition restreignant la liberté religieuse selon la nature des postes et des fonctions exercées, d'adopter une rédaction la plus précise possible afin d'éviter une interdiction générale et absolue. Elle les engage à :
- reproduire au préalable le texte de l'article L. 1121-1 du code du travail ;
- inscrire la possibilité de discuter, au cas par cas, avec les intéressés les modalités des restrictions adoptées pour concilier au mieux leurs convictions et les intérêts de l'entreprise.

Gérer les RTT ou les CP les jours de fêtes religieuses

Refus de l'employeur. - Si un salarié demande une journée de RTT, de congés payés ou de repos compensateur, celle-ci coïncidant avec un jour de fête religieuse, l'employeur peut la lui refuser s'il reste dans le cadre des règles habituelles à ces absences, en procédant comme pour n'importe quelle autre demande. La HALDE souligne que le refus de l'employeur ne doit toutefois pas être discriminatoire. Tel serait le cas si sa décision trouvait sa seule motivation dans la coïncidence avec un jour de fête religieuse et non pas dans la nécessité d'assurer le bon fonctionnement de l'entreprise. Ainsi, l'employeur doit-il être à même de justifier sa mesure par des impératifs liés à la bonne marche de l'entreprise (délib. HALDE 2009-117, point 21). Autrement dit, la présence du salarié doit être nécessaire ce jour-là (ex. : son absence empêcherait une livraison importante).

Procédure d'autorisation. - Les employeurs souhaitant mettre en place une procédure d'autorisation d'absence spécifique peuvent s'inspirer de la recommandation que la HALDE a faite au ministre du Travail (rapport HALDE 2008, p. 28). Celle-ci devrait être transparente, contrôlable et fondée sur des critères objectifs, non discriminatoires, en vue de faciliter les demandes d'absence des salariés (par exemple, via un jour de CP ou une RTT), sous réserve des nécessités de service. La HALDE recommande d'ailleurs qu'une telle procédure soit inscrite dans le code du travail.

L'avis des tribunaux

Harcèlement moral : le juge ne peut pas imposer à l'employeur de modifier ou rompre le contrat du harceleur

Des victimes demandent au juge d'intervenir. - Des salariés, victimes de harcèlement moral par la directrice de leur établissement, ont saisi le juge afin qu'il ordonne à l'employeur « d'écarter la directrice de ses fonctions ». Ils n'ont pas obtenu gain de cause.

Obligation de l'employeur et rôle du juge. - C'est à l'employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral (c. trav. art. L. 1152-4). Il a d'ailleurs une obligation de sécurité de résultat en la matière (cass. soc. 21 juin 2006, n° 05-43914, BC V n° 223).

Selon la Cour de cassation, il n'entre pas dans les pouvoirs du juge d'ordonner à un employeur la modification ou la rupture du contrat de travail du salarié auquel sont imputés des agissements de harcèlement moral, à la demande d'autres salariés, tiers à ce contrat.

En l'espèce, l'injonction qu'il était demandé au juge de délivrer à l'employeur impliquait une modification du contrat de travail de la directrice. Or, celle-ci ne pouvait être réalisée qu'avec l'accord de l'intéressée, faute de quoi c'était à l'employeur d'envisager son licenciement. Les salariés, victimes du harcèlement, se donc vus déboutés de leur demande.

Cass. soc. 1er juillet 2009, n° 07-44482 FSPBR


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Gérard Fourmal

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