Convention de forfaitPar la convention de forfait, employeur et salarié peuvent décider d’une rémunération forfaitaire incluant le salaire habituel et les heures supplémentaires. Il existe plusieurs types de forfait : - le forfait en heures, hebdomadaire, mensuel ou annuel ; - le forfait en jours, annuel. Si certains forfaits peuvent être signés par tous les salariés, d’autres ne sont réservés qu’à une catégorie d’entre eux (voir tableau ci-après). À noter… Sur l’exonération d’impôt sur le revenu et de charges sociales, créée par la loi TEPA, sur cetaines heures, voir Heures supplémentaires (détaxation)*. Mises en place Écrit obligatoire pour tous les forfaits - Une convention individuelle écrite, signée du salarié et de l’employeur est impérative pour tous les forfaits, y compris hebdomadaires et mensuels (c. trav. art. L. 3121-40). Elle marque l’accord du salarié. Attention… Même si le principe du forfait est posé par une convention collective, le paiement des heures supplémentaires selon un forfait ne peut résulter que d’un accord particulier entre l’employeur et le salarié (cass. soc. 3 juin 2009, n° 07-44951 D). Accord collectif indispensable pour les forfaits annuels en heures ou en jours - Un accord collectif est indispensable pour qu’un employeur recoure aux forfaits en heures ou en jours sur l’année (c. trav. art. L. 3121-39). Il peut s’agir d’un accord collectif d’entreprise ou d’établissement (ou, à défaut, d’une convention ou d’un accord de branche). L’accord collectif doit fixer, a minima : - les catégories de salariés susceptibles de signer la convention individuelle de forfait en cause, dans le respect des contraintes légales (voir ci-après) ; - la durée annuelle de travail à partir de laquelle le forfait est établi, sachant que pour les forfaits annuels en jours, l’accord collectif doit fixer le volume maximal des conventions individuelles de forfait qui seront proposées aux salariés dans une limite de 218 jours par an (voir ci-après) ; - les caractéristiques principales de ces conventions. Pour les forfaits annuels en jours, l’accord détermine également le nombre annuel maximal de jours susceptibles d’être travaillés en cas de rachat de jours de repos (voir ci-après). Attention… La législation antérieure à la loi 2008-789 du 20.08.2008 (JO du 21) est abrogée. Cependant, les accords collectifs relatifs aux forfaits annuels en heures ou en jours antérieurs au 21.08.2008 restent en vigueur (loi 2008-789 du 20 août 2008, art. 19-III). Si ces accords venaient à être renégociés, l’employeur devrait procéder par avenants au contrat de travail s’il souhaitait modifier les clauses individuelles de forfait des salariés concernés. Consultation du comité d’entreprise - Chaque année, l’employeur doit consulter le comité d’entreprise sur l’aménagement du temps de travail sous forme de forfait ainsi que sur les modalités de suivi de la charge de travail des salariés concernés (y compris les forfaits hebdomadaires ou mensuels). Cette procédure se déroule dans le cadre de la consultation sur la durée et l’aménagement du temps de travail (c. trav. art. L. 2323-29). Forfait hebdomadaire ou mensuel Pour tout salarié - La durée du travail de tout salarié peut être fixée par une convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ou sur le mois (c. trav. art. L. 3121-38). À noter… Avant l’entrée en vigueur de la loi 2008-789 du 20.08.2008 (JO du 21), qui a introduit le forfait hebdomadaire ou mensuel dans le code du travail, la jurisprudence admettait déjà qu’un salarié signe une convention de forfait d’heures supplémentaires sur la semaine ou sur le mois (cass. soc. 27 septembre 2006, n° 05-40660 FSD). Ce type de forfait est ouvert aux salariés, cadres ou non cadres. L’employeur peut l’utiliser même en l’absence d’accord collectif. Attention… Toutes les dispositions légales concernant la durée du travail et les temps de repos sont applicables aux salariés en forfait hebdomadaire ou mensuel en heures. Contenu - La seule fixation d’une rémunération forfaitaire, sans que soit déterminé le nombre d’heures supplémentaires inclus dans la rémunération, ne permet pas de caractériser une convention de forfait (cass. soc. 5 mai 2010, n° 08-43652 FSPB). Le nombre d’heures supplémentaires inclut dans la rémunération doit donc être précisément défini, faute de quoi la convention de forfait est inopérante. Rémunération - L’employeur verse au salarié une rémunération au moins égale à la rémunération minimale applicable dans l’entreprise pour le nombre d’heures compris dans le forfait augmentée des majorations légales ou conventionnelles des heures supplémentaires comprises dans le forfait (c. trav. art. L. 3121-41). Attention… Le bulletin de paie du salarié signataire d’une convention de forfait doit mentionner la nature et le volume du forfait (c. trav. art. R. 3243-1). Pour aller plus loin sur ce point, voir Dictionnaire Paye, « Convention de forfait ». Effets - Lorsque la convention de forfait est licite, le salarié ne peut pas réclamer le paiement des heures supplémentaires incluses dans la rémunération forfaitaire. En revanche, les heures supplémentaires non prévues initialement doivent lui être payées en plus du forfait et apparaître distinctement sur le bulletin de paye (cass. soc. 5 janvier 2000, n° 97-44606 D). Forfait annuel en heures Salariés concernés - C’est l’accord collectif autorisant le recours aux forfaits annuels en heures qui détermine les salariés susceptibles d’être concernés (voir ci-avant). À cet égard, la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures sur l’année est permise avec uniquement deux catégories de salariés (c. trav. art. L. 3121-42) : - les cadres dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, de l’équipe ou du service auquel ils sont intégrés ; - les salariés qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps. Durée annuelle de travail - La convention de forfait en heures sur l’année prévoit un nombre d’heures propre au salarié, dans la limite de la durée annuelle fixée par l’accord collectif (voir ci-avant) pour ce type de convention (c. trav. art. L. 3121-42). Rémunération - L’employeur verse au salarié une rémunération au moins égale à la rémunération minimale applicable dans l’entreprise pour le nombre d’heures compris dans le forfait augmentée des majorations légales ou conventionnelles des heures supplémentaires comprises dans le forfait (c. trav. art. L. 3121-41). Attention… Le bulletin de paie du salarié signataire d’une convention de forfait doit mentionner la nature et le volume du forfait (c. trav. art. R. 3243-1). Pour aller plus loin sur ce point, voir Dictionnaire Paye, « Convention de forfait ». Pas de contingent d’heures supplémentaires - Le contingent d’heures supplémentaires ne s’applique pas aux salariés liés par une convention de forfait annuel en heures (c. trav. art. D. 3121-14-1). À noter… Toutes les autres dispositions relatives à la durée du travail et aux repos sont applicables aux salariés ayant conclu un forfait en heures sur l’année (circ. DGT du 13 novembre 2008, fiche n° 14). Obligation de comptabiliser la durée du travail - La conclusion d’une convention de forfait en heures sur une base annuelle ne dispense pas l’employeur de justifier du nombre d’heures travaillées. Ce dernier doit être en mesure de présenter à l’inspection du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail (c. trav. art. L. 3171-2). Modalités de décompte - L’obligation de comptabiliser la durée du travail est remplie par l’enregistrement par tout moyen des durées quotidiennes du travail accomplies ou des heures de début et de fin de chaque période de travail et, par la récapitulation hebdomadaire, de la durée du travail effectuée. Toutefois, ces dispositions relatives au décompte des horaires ne sont pas applicables si les conventions et accords collectifs prévoyant des conventions de forfait en heures fixent les modalités de contrôle de la durée du travail (c. trav. art. D. 3171-9).
Forfait annuel en jours Salariés concernés - C’est l’accord collectif autorisant le recours aux forfaits annuels en jours qui détermine les salariés susceptibles d’être concernés (voir ci-avant), sachant que le dispositif ne peut légalement concerner que deux catégories de salariés (c. trav. art. L. 3121-43) : - les cadres qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable dans le service, l’équipe ou l’atelier auquel ils sont intégrés ; - les salariés dont la durée du temps de travail ne peut pas être prédéterminée et qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps pour l’exercice de leurs responsabilités. Volume maximal de la convention de forfait - La convention individuelle de forfait signée entre l’employeur et le salarié doit respecter la limite fixée par l’accord collectif, qui est de 218 jours (c. trav. art. L. 3121-44). À noter… À notre sens, la combinaison des dispositions relatives au volume maximal d’une convention de forfait et de celles relatives aux rachats des jours de repos (voir ci-après) interdit de signer d’emblée une convention de forfait pour plus de 218 jours par an. Des jours travaillés au-delà de cette limite ne peuvent l’être, par la suite, que sur demande du salarié et avec l’accord de l’employeur dans le cadre d’un avenant spécifique à la convention individuelle de forfait. Justification du nombre de jours travaillés - La durée du travail des cadres ayant un forfait en jours doit être décomptée, chaque année, par récapitulation du nombre de journées ou demi-journées travaillées par chaque salarié. L’employeur doit tenir à la disposition de l’inspecteur du travail, pendant une durée de 3 ans, le ou les documents existant dans l’entreprise ou l’établissement permettant de comptabiliser le nombre de jours de travail effectués par les cadres au « forfait en jours » sur une base annuelle (c. trav. art. D. 3171-10).
Application partielle de la législation sur la durée du travail - Les salariés en forfait annuel en jours ne bénéficient pas de la durée légale du travail (pas d’heures supplémentaires), des limites de durées quotidienne et hebdomadaire maximales de travail (respectivement, 10 h sur une journée, 48 h sur une semaine isolée, 44 h sur 12 semaines consécutives). En revanche, l’employeur doit respecter les normes légales en matière de repos quotidien (11 h consécutives minimum), repos hebdomadaire (35 h) et congés payés (c. trav. art. L. 3121-43). Bien que la loi ne le mentionne pas, il paraît également logique de respecter les jours fériés chômés dans l’entreprise.
Entretien individuel annuel obligatoire -L’employeur organise un entretien annuel avec chaque salarié en convention de forfait en jours sur l’année. Cet entretien doit porter sur la charge de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale ainsi que la rémunération du salarié (c. trav. art. L. 3121-46). À noter… Avant l’entrée en vigueur de la loi 2008-789 du 20.08.2008 (JO du 21), le code du travail disposait que l’accord collectif permettant la conclusion d’une convention de forfait en jours devait prévoir des modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés concernés, de l’amplitude de leurs journées d’activité et de la charge de travail qui en résultait (c. trav. art. L. 3121-45 dans sa version antérieure au 22 août 2008). Dans le cadre d’une affaire où l’accord collectif autorisant la conclusion du forfait en jours prévoyait un suivi d’activité, il a été jugé que le manquement de l’employeur à cette obligation conventionnelle ne remettait pas en cause la validité de la convention et que le salarié concerné avait uniquement droit à des dommages et intérêts. Cette solution formulée sous l’empire des anciennes dispositions légales reste toutefois intéressante, puisque les accords collectifs autorisant le recours aux conventions de forfait en jours sur l’année conclus avant le 22.08.2008 restent en vigueur (loi 2008-789 du 20 août 2008, art. 19-III, JO du 21 ; cass. soc. 13 janvier 2010, n° 08-43201 FSPB). Rémunération - Pour un salarié en forfait annuel en jours, le salaire doit être en rapport avec les sujétions que son travail implique. Attention… Le bulletin de paye du salarié signataire d’une convention de forfait doit mentionner la nature et le volume du forfait (c. trav. art. R. 3243-1). Pour aller plus loin sur ce point, voir Dictionnaire Paye, « Convention de forfait ». Si le salarié signataire d’une convention de forfait annuel en jours perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec ces sujétions, il peut obtenir en justice une indemnité (c. trav. art. L. 3121-47). Cette indemnité doit être calculée en fonction du préjudice subi, en tenant notamment compte du niveau de salaire pratiqué dans l’entreprise pour le niveau de qualification du salarié concerné. Il est impossible d’écarter ce droit par une clause de l’accord collectif ou du contrat de travail. À noter… Seul le salarié susceptible d’être, par application des dispositions légales et conventionnelles, soumis à une convention de forfait en jours peut saisir le tribunal afin que lui soit allouée cette indemnité, dès lors qu’il perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées (cass. soc. 31 octobre 2007, n° 06-43876, BC V n° 180). Calcul de la retenue sur salaire en cas d’absence pour grève - voir Grève*. Charge de la preuve d’un dépassement du forfait jours - Lorsque le salarié soutient avoir dépassé le forfait de jours prévu pas son contrat et réclame le paiement des jours de travail excédentaires, la preuve du nombre de jours travaillés ne lui incombe pas particulièrement. Il doit présenter au juge des éléments de nature à étayer sa demande et, en réponse, l’employeur est tenu de fournir des éléments justifiant des jours effectivement travaillés. La charge de la preuve ne peut pas reposer uniquement sur le salarié. Le juge forme sa conviction au vu des pièces produites par l’employeur et par le salarié, après avoir éventuellement ordonné des mesures d’instruction (c. trav. art. L. 3171-4 ; cass. soc. 23 septembre 2009, n° 08-41377, BC V n° 200). À noter… Les modalités retenues sont les mêmes que celles applicables en cas de litige sur le nombre d’heures de travail (c. trav. art. L. 3171-4 ; cass. soc. 25 février 2004, n° 01-45441, BC V n° 62). Rachat de jours de repos Pour les salariés en forfait annuel en jours - Le salarié qui le souhaite peut, avec l’accord de l’employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d’une majoration de salaire et ainsi travailler au-delà de la durée prévue à la convention de forfait, sous réserve toutefois de respecter le nombre maximal de jours travaillés dans l’année (voir ci-après). Il faut un accord écrit de l’employeur et du salarié, par exemple, sous la forme d’un avenant à la convention individuelle de forfait initiale (un accord collectif n’est pas indispensable pour permettre et aménager les conditions d’un dépassement de la durée initialement prévue dans la convention de forfait (c. trav. art. L. 3121-45). Attention… Cet avenant doit être renouvelé chaque année concernée par le dépassement de la durée prévue dans la convention de forfait. Par exemple, un avenant de dépassement à durée indéterminée ou pour un nombre d’années précis (ex. : « renonciation à 5 jours de repos pour les années 2010, 2011 et 2012 ») n’est, à notre sens, pas valable quand bien même employeur et salarié en conviendraient. Il leur faut signer un avenant chaque année concernée (dans notre exemple, un avenant en 2010, un en 2011 et un en 2012) (circ. 2008-20 du 13 novembre 2008, fiche n° 14). La majoration de salaire dont bénéficie le salarié est fixée par un avenant à la convention de forfait initiale, sachant qu’elle doit au minimum être égale à la valeur de ce temps de travail supplémentaire, majorée de 10 %. Rachat de jours de repos - Le nombre de jours travaillés dans l’année, suite au rachat de jours de repos, ne peut pas dépasser le nombre annuel maximal de jours travaillés fixés par l’accord collectif (voir ci-avant). À défaut de précision dans l’accord collectif, le maximum est de 235 jours par an. Exemple En tout état de cause, le nombre de jours travaillés doit être compatible avec les règles sur les congés payés, les jours fériés chômés dans l’entreprise, le repos hebdomadaire et le repos quotidien. À noter… L’accord collectif peut aller au-delà de 235 jours. À l’extrême limite, serait envisageable un plafond maximal de 281 jours par an (compte tenu des 5 semaines de congés payés, du 1er Mai chômé et du repos dominical), duquel il conviendrait de déduire également les jours fériés chômés dans l’entreprise autres que le 1er Mai. Modification du forfait La convention de forfait présente un caractère contractuel et sa modification ne peut donc résulter que de l’accord de l’employeur et du salarié. Le salarié est donc en droit de refuser la modification de son contrat de travail et d’exiger l’application de celui-ci (cass. soc. 6 juillet 1999, n° 96-45787, BC V n° 323). Références RF Social, Cahier juridique 80 « Emploi des cadres » ; Cahier juridique 91 « Heures complémentaires, supplémentaires et forfaits » ; Guide RF, « Durée et aménagement du temps de travail ».Plusieurs modèles sous « Durée du travail » Cadres; Heures supplémentaires ; Heures supplémentaires (détaxation).;
|
Actusapie est la publication mensuelle de notre organisation. vous y retrouverez les nouveautés législatives et les jurisprudences essentielles, ainsi que des analyses et des rappels permettant d’exercer efficacement le rôle de représentant du personnel.